Après les crises de 1930, 2003 et 2008, des économistes comme Stiglitz et Chapra… ont donné des propositions allant dans le sens de repenser la stabilité financière tout en instaurant de nouveaux dispositifs : l’introduction de nouvelles normes de contrôle de banques, la limitation de prise de risque excessif, la transparence et l’adoption d’une nouvelle discipline de gestion. À la suite de ces propositions, la finance islamique s’est distinguée grâce à son caractère fondamentalement moral. La finance islamique recouvre l’ensemble des transactions et produits financiers conformes à la « charia ». Sa perspective est éthique et elle repose sur cinq piliers que sont l’interdiction de l’usure ou intérêt (riba), la spéculation (maysir), l’incertitude sur les caractéristiques du contrat (gharar), les activités illicites, du partage des pertes et de profits et l’adossement à un actif tangible.

Articulée aux marchés financiers, la finance islamique s’apparente à un style de gestion de portefeuille qui traduit le désir d’une catégorie d’investisseurs de fructifier leur capital sans que cela puisse entrer en conflit avec les préceptes religieux qui sont censés régir leur vie spirituelle.

Dans le contexte, des pays de l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA), un placement en action de la Bourse Régionale des Valeurs Mobilières (BRVM) soumis à des conditions particulières ne constitue pas en soi une opération interdite par la loi islamique.

La spécificité de la BRVM en matière de finance islamique tient essentiellement à l’importance de sa communauté musulmane. Il s’agit de la plus importante communauté de la zone économique selon Baldé et al. (2021)[1]. Cette caractéristique zonale constitue un argument symbolique majeur en faveur du développement de la finance islamique. Mais, ces croyants ne peuvent investir dans ce marché boursier du fait de l’existence d’activités et de pratiques non-conformes à la loi islamique. L’un des atouts de la BRVM est (qu’il est un) le marché financier au comptant standardisé. Autrement dit, l’acheteur devra disposer des espèces avant de procéder à une vente et le vendeur (devra détenir) des titres avant de procéder à la vente. En outre, la réglementation a favorisé l’introduction des sukuk, en vue de faciliter la mobilité des fonds en quête de diversification financière et géographique. Enfin, les agents économiques à déficit de financement pourront bénéficier d’une diversification des sources de financement.

Les titres auxquels les agents à excédent de financement peuvent investir conformément à la loi islamique à la BRVM sont les actions suite à des processus de filtrages qualitatif et quantitatif et des sukuk. Afin de profiter pleinement de cette opportunité, la réglementation financière prendrait en compte les spécificités de la finance islamique. Ainsi, elle constituerait l’un des aménagements nécessaires pour renforcer sa compétitivité dans le secteur de la finance.

Cependant, pour rendre la Bourse de l’Afrique de l’Ouest plus compétitive dans l’attrait des capitaux musulmans et étrangers, il est indispensable de :

  • Créer un indice islamique adapté à la BRVM : la méthodologie adoptée pour identifier l’indice islamique s’articule en deux grandes étapes. Une première est axée sur l’utilisation de filtre qualitatif. Ce dernier consiste à effectuer une exclusion des entreprises évoluant dans les secteurs illicites. Une deuxième met le focus sur le filtre quantitatif avec le calcul de la médiane. En effet, la médiane est beaucoup plus robuste que la moyenne, mais aussi elle est plus en cohérence avec le principe de « wassatiya », le juste milieu que la fraction de 33% utilisée par de nombreuses études. Le concept de « juste milieu » est le plus important sur le plan théologique, après celui de « Tawhid », l’unicité d’Allâh. Il s’appuie sur l’idée d’équilibre, de modération, de mesure, du refus de tout excès, de tout désespoir et de toute idolâtrie (Chérif, 2020). 
  • Mettre en place un « comité charia » avec le contexte de bourse régionale, notamment des pays comme le Mali, le Burkina Faso, le Sénégal… dominé par l’école de pensée malikite facilitera la tâche sur le choix des personnes composées d’experts et de spécialistes en finance islamique et en « fiqh ». Il est chargé de la validation des actions, des opérations de la BRVM et la vérification et l’assurance de la conformité des diverses opérations et transactions aux dispositions et préceptes de la loi islamique. Il doit aussi étudier tous les documents et procédures dans le cadre de l’audit « charaïque » externe afin de s’assurer de la bonne application de ses décisions. 
  • Créer des fonds communs de placement islamique.

[1] https://www.cribfb.com/journal/index.php/ijibfr/article/view/1600

Par Moustapha BALDE, Docteur en économie option marché financier et finance islamique, Enseignant-Chercheur, Membre du Laboratoire de Recherche en Economie à l’UGB de Saint Louis

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