Le chef de l’État Bassirou Diomaye Faye a insisté, en Conseil des ministres du mercredi 29 janvier 2025, sur la nécessité d’évaluer l’action de la Société des Mines de fer du Sénégal oriental (MIFERSO) et de la Société des Mines du Sénégal (SOMISEN). Il a ainsi demandé au Premier Ministre de veiller à ce que les efforts de ces deux entités soient complémentaires et qu’elles agissent de manière synergique pour maximiser les retombées positives du secteur.
Analysant cette posture du Président de la République, Mbaye Hadj, Ingénieur en Génie électrique, estime que l’optimisation des retombées du secteur minier passe avant tout par un cadre réglementaire robuste, une gouvernance transparente et une intégration plus efficace dans l’économie nationale. Fort de cela, il considère qu’il faut d’abord réformer le Code minier pour s’assurer que les contrats signés garantissent une juste répartition des bénéfices entre l’État, les entreprises et les populations locales.
La transparence, à ses yeux, doit être un impératif à travers la publication systématique des contrats et des revenus miniers et permettrait d’éviter les dérives et de restaurer la confiance. L’autre facteur essentiel, selon Mbaye Hadj, est de faire du développement du contenu local est un autre levier incontournable. « L’exploitation des ressources naturelles ne peut pas se limiter à l’extraction brute. Il faut astreindre aux compagnies minières un recours accru aux fournisseurs locaux et exiger des investissements dans la formation et le transfert de compétences. L’objectif est clair : réduire la dépendance aux expertises étrangères et assurer une montée en compétences des travailleurs nationaux », souligne l’expert.
Pour lui, retombées du secteur doivent aussi être visibles dans les communautés impactées. « Trop souvent, les mines exploitent des territoires sans laisser de bénéfices durables aux populations. Il faut institutionnaliser des contributions obligatoires au développement local sous forme d’investissements dans les infrastructures, l’éducation et la santé », ajoute Mbaye Hadj. D’un autre côté, il pense que les entreprises minières doivent être tenues responsables de la réhabilitation des sites après exploitation et d’une gestion rigoureuse des impacts écologiques.
Optimiser la fiscalité
Pour une gestion optimale des ressources minières, Mbaye Hadj est également d’avis qu’il faut optimiser la fiscalité minière. Car, indique-t-il, trop d’exonérations fiscales et d’opérations financières opaques réduisent les revenus réels de l’État. Ainsi, il préconise un contrôle accru des transactions financières et une politique fiscale mieux adaptée qui peuvent permettre d’augmenter significativement la part des revenus miniers dans le budget national. « Le secteur minier offre un fort potentiel de mobilisation de recettes fiscales, mais il est aussi marqué par des fragilités structurelles. Parmi ses atouts, il représente une source majeure de revenus grâce aux taxes, royalties et dividendes. L’exploitation des ressources attire des investissements directs étrangers qui stimulent l’économie et permettent le développement d’infrastructures essentielles », constate M. Hadj.
À son avis, il contribue aussi de manière significative aux exportations et à la balance commerciale. Cependant, dit il, ces avantages sont contrebalancés par plusieurs faiblesses. « D’abord, l’évasion fiscale reste un problème majeur. Les multinationales utilisent des stratégies d’optimisation qui réduisent considérablement la part des revenus revenant à l’État. Ensuite, la volatilité des prix des matières premières rend les recettes minières instables ; ce qui complique la planification budgétaire. Par ailleurs, les nombreuses exonérations fiscales accordées aux investisseurs diminuent les gains à court terme. L’impact environnemental et social de l’exploitation minière engendre également des coûts indirects importants que l’État doit assumer », explique Mbaye Hadj. Ainsi, pour maximiser l’impact fiscal du secteur, il est impératif d’imposer des règles plus strictes en matière de transparence financière et de lutter activement contre l’évasion fiscale.
Un secteur créateur d’emplois
Le secteur minier a un potentiel réel de création d’emplois, mais cet impact reste limité par plusieurs facteurs, selon Mbaye Hadj. En phase d’exploration, insiste-t-il, les besoins en main-d’œuvre sont restreints et concernent principalement des profils hautement qualifiés. La phase d’exploitation est celle qui génère le plus d’emplois, notamment pour les mineurs, les techniciens et les ingénieurs.
Cependant, il signale que plus le niveau de mécanisation est élevé, plus le besoin en main-d’œuvre diminue. « Les emplois indirects constituent une part importante des opportunités générées par le secteur. Le développement des services de transport, de logistique, de maintenance et de sécurité autour des mines peut absorber une main-d’œuvre locale importante. De plus, l’exploitation minière crée des opportunités pour les fournisseurs d’équipements et de services spécialisés », dit Mbaye Hadj.
Poursuivant son analyse, il soutient que ces emplois restent en grande partie temporaires et peu qualifiés. Pour maximiser l’impact sur l’emploi, il pense qu’il faut impérativement favoriser la transformation locale des minerais et intégrer la main-d’œuvre nationale à toutes les étapes de la chaîne de valeur. Sans oublier, la mise en place de programmes de formation spécialisés, en lien avec les besoins du secteur, permettrait d’améliorer l’employabilité des jeunes et d’assurer une main-d’œuvre compétente sur le long terme.
Des initiatives, qui d’après lui, doivent aller au-delà des simples discours. « Elles doivent être suivies d’actions concrètes, qui allient réglementation stricte, gouvernance transparente et vision stratégique de long terme. L’optimisation des retombées du secteur minier ne doit pas seulement reposer sur la maximisation des profits, mais sur une redistribution équitable des bénéfices, l’épanouissement des communautés locales et la préservation de notre environnement. C’est une question de justice économique et de souveraineté », propose Mbaye Hadj.