Dans l’Union Monétaire Ouest Africaine (UMOA), le capital social minimum des banques a été relevé de 10 à 20 milliards de FCFA par le conseil des Ministres à compter du 1er janvier 2024. La durée limite de mise en œuvre de la décision est fixée à trois années. Ainsi, au 31 décembre 2026, toutes les banques de l’Union devront s’être conformées à la décision. Le montant de 20 milliards de FCFA correspond actuellement à 33,3 millions de dollars US. En effet, même si le capital social minimum des banques est en général fixé dans la monnaie du pays, elle correspond approximativement à la contrevaleur d’un montant de référence dans une devise internationale, particulièrement le dollar US ou l’euro.

Dans le passé, le capital minimum des banques dans l’UMOA est passé de 300 millions FCFA dans les années 60, à un milliard de FCFA dans les années 80, à 10 milliards de FCFA à compter du 1er janvier 2008 et à 20 milliards de FCFA à partir du 1er janvier 2024. Le relèvement de 2008 s’est fait en deux phases : 5 milliards de FCFA au plus tard le 31 décembre 2010 et 10 milliards de FCFA au plus tard le 1er juillet 2017. Au 1er janvier 2008, les 10 milliards de FCFA correspondaient à 22,3 millions de dollars US.

Au Nigéria, le capital social minimum des banques a été relevé, à compter du 1er avril 2024, de 10 à 50 milliards de nairas pour les banques régionales, de 25 à 200 milliards de nairas pour les banques nationales et de 50 à 500 milliards de nairas pour les banques internationales. Les banques nigérianes ont jusqu’au 31 mars 2026, soit une durée limite de mise en œuvre de deux années, pour se conformer au niveau capital minimum.

Dans le passé, le 6 juillet 2004, la Banque Centrale du Nigéria avait décidé du relèvement du capital social minimum des banques de 2 à 10 milliards de nairas pour les banques régionales, à 25 milliards de nairas pour les banques nationales et à 50 milliards de nairas pour les banques internationales. Les 10 milliards de nairas de 2005 des banques régionales valaient 75 millions de dollars et les 50 milliards de nairas d’aujourd’hui valent 37,6 millions de dollars US ; les 25 milliards de nairas de 2005 des banques nationales valaient 188 millions de dollars et les 200 milliards de nairas d’aujourd’hui valent 150,4 millions de dollars US ; les 50 milliards de nairas de 2005 des banques internationales valaient 376 millions de dollars et les 500 milliards de nairas d’aujourd’hui valent le même montant, soit 376 millions de dollars US. Bref, la multiplication par dix du capital du minimum des banques internationales en nairas a été annihilée en dollars par la forte dépréciation dans les mêmes proportions de la monnaie nationale par rapport au dollar.

Le fort relèvement du capital minimum des banques nigérianes en 2005 a entraîné, par le biais de fusions et d’acquisitions, une importante réduction de leur nombre, faisant passer le nombre total de banques au Nigéria de 89 à 24 et surtout donnant naissance à des groupes bancaires plus puissants, plus solides et plus résilients.

Au Ghana, le capital social minimum des banques a été relevé de 120 à 400 millions de cedis à compter du 11 septembre 2017. La date limite de mise en œuvre était fixée au 31 décembre 2018, soit une durée de 15 mois et 19 jours. Le montant de 400 millions de cedis correspondait au moment de la décision à 100 millions de dollars US. Aujourd’hui, les 400 millions de cedis font 26,3 millions de dollars US, la parité dollar/cedis étant passée, entre le 11 septembre 2017 et aujourd’hui, de 4,4 cedis à 15,2 cedis, soit une multiplication par 3,5.

Pour ce qui est des autres pays de la CEDEAO, le capital social minimum de leurs banques est très nettement moins élevé, comparé à ceux du Nigéria, du Ghana et de l’UMOA, sans doute en raison de leurs économies plus faibles :

–       800 millions d’escudos cap verdiens (7,8 millions USD) pour le Cap Vert ;

–       200 millions de dalasis gambiens (2,9 millions USD) pour la Gambie ;

–       100 milliards de francs guinéens (11,6 millions USD) pour la Guinée ;

–       85 milliards de leones sierra-léonais (3,8 millions USD) pour la Sierra Leone ;

–       10 millions de dollars US pour le Libéria. Il faut noter que ce pays-ci a préféré fixer règlementairement le capital social minimum de ses banques dans une monnaie internationale, à savoir le dollar US.

Outre le capital social minimum requis, les banques doivent chacune respecter les exigences minimales de fonds propres correspondant à leur niveau de risques (risque de crédit , risque opérationnel et risque de marché). L’exigence minimale de fonds propres la plus connue est celle qui veut que les fonds propres effectifs couvrent un pourcentage déterminé des risques pondérés de la banque. Ce pourcentage est fixé règlementairement par le Régulateur et il est de 9 % dans l’UMOA. Donc, si le ratio de solvabilité d’une banque se situe au minimum, celle-ci doit augmenter ses fonds propres pour pouvoir continuer à faire du crédit tout en respectant la norme prudentielle.

Les fonds propres effectifs (FPE) sont constitués du capital social libéré auquel :

–       On ajoute principalement : le report à nouveau créditeur, le bénéfice intermédiaire, les réserves, les primes d’émission, les subventions d’investissement, les comptes bloqués d’actionnaires, les emprunts subordonnés etc. ;

–       On déduit principalement : le report à nouveau débiteur ; la perte de l’exercice en cours, les immobilisations incorporelles, les participations croisées etc. ;

En clair, il est possible pour une banque de respecter l’exigence de capital social minimum, sans respecter celles de fonds propres minimums. A l’inverse, une banque peut respecter les exigences de fonds propres minimums, sans respecter l’exigence de capital social minimum. Les banques doivent respecter à tout instant toutes exigences ; à défaut, elles sont en infraction.

Les décisions de relèvement du capital social minimum sont une prise en compte des recommandations du Comité de Bâle, toutes centrées sur le niveau et la qualité des fonds propres. Elles visent à renforcer la solidité et la résilience des banques et leur capacité à financer l’économie. Elles sont consignées dans les documents suivants appelés :

–       Convergence Internationale de la Mesure et des Normes de Fonds Propres – Juillet 1988 ou Bâle I ;

–       Convergence Internationale de la Mesure et des Normes de Fonds Propres – Juin 2004 ou Bâle II ;

–       Dispositif réglementaire mondial visant à renforcer la résilience des établissements et systèmes bancaires – Décembre 2010 ou Bâle III ;

Les mesures de relèvement du capital social minimum dans l’UMOA, au Nigéria et au Ghana répondent toutes aux mêmes objectifs. Mais certaines de leurs conséquences ou les intensités d’autres n’ont pas été les mêmes. Ainsi, dans l’UMOA, le relèvement du capital social minimum n’a pas eu l’effet structurant sur le secteur bancaire qu’il a eu au Nigéria et au Ghana, par le biais de fusions et acquisitions. Il semble aussi que dans l’UMOA les augmentations de capital se sont faites moins par injection d’argent frais que par incorporation de réserves. Et qui dit moins d’argent frais, dit moindre accroissement de la capacité de financement. Les délais de mise en œuvre plus longs expliqueraient, entre autres, la plus grande capacité que les banques de l’UMOA ont pour constituer plus de réserves et pour se conformer au nouveau dispositif.

Mamadou SÈNE, Auteur de « La banque expliquée à tous – Focus sur l’Afrique

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